Réussir la réforme de l'école luxembourgeoise (Editorial Journal 3/2006) Adam Monique

12.06.2006

Madame Delvaux a affiché clairement sa volonté de réformer l'école luxembourgeoise: profil de la politique linguistique éducative, réforme de la loi scolaire de 1912, cycles d'apprentissage, socles de compétences...

Des réformes nécessaires, mais pas faciles à réaliser et qui demandent l'adhésion de tous les partenaires et surtout des enseignantes et enseignants à qui il revient de les réaliser.

L'avant-projet de loi concernant l'organisation de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire lancé il y a 18 mois par la Ministre va dans le sens d'un meilleur encadrement des élèves, d'une plus forte différenciation, voire d'une individualisation des offres d'apprentissage et il a rencontré un intérêt certain parmi les instituteurs et institutrices. Ceux-ci s'en sont emparés pour aller de l'avant et ils ont en même temps présenté leurs propositions de cogestion de l'école. Ces propositions ont émergé notamment des deux journées de réflexion pédagogique, organisées par la FGIL et le SEW début 2005 et début 2006, tout comme de l'entente des comités de cogestion qui ont organisé une première manifestation publique en mai 2006.

C'est bien la première fois depuis longtemps qu'une masse critique d'enseignants se sont regroupés pour esquisser les perspectives d'équipes enseignantes et éducatives s'organisant au mieux afin de garantir la progression des apprentissages de leurs élèves. Il s'agit d'une position courageuse, car elle ne méconnaît point les difficultés d'une école qui a de plus en plus de mal à faire vivre ensemble des élèves qui arrivent avec des moyens de compréhension et de communication de plus en plus hétérogènes. Elle confie aux équipes pédagogiques le soin de trouver pour chaque élève des situations d'apprentissage pertinentes, ce qui n'est pas une mince affaire.

Madame Delvaux a eu le mérite d'esquisser un changement possible. Maintenant il s'agit de poser les jalons qui vont opérer le changement. Ce ne sont pas des mesures simplistes comme la suppression des devoirs à domicile ou le remaniement des critères de promotion qui feront changer de cap. Si Madame Delvaux veut réussir une réforme durable, elle devra renforcer la confiance et la motivation des enseignants. Réaliser cela avec des économies en personnel reviendrait à la quadrature du cercle.

Or, les discussions sur la tâche des enseignants du secondaire et secondaire technique, qui visaient dans un premier temps à octroyer deux leçons d'enseignement supplémentaires aux enseignants nous avaient fait douter des intentions réelles de la Ministre. Pour le SEW/OGB-L, une discussion sur la tâche ne peut en aucun cas aller dans le sens d'une augmentation des leçons à prester en vue d'une économie en personnel. Madame Delvaux doit faire un choix: réformer ne rime pas avec économiser.

Etant donné que l'Intersyndicale a, à plusieurs reprises et avec le soutien de la majorité du personnel concerné, rappelé sa position concernant une redéfinition qualitative et quantitative de la tâche devant la ministre, cette dernière a accepté d'entrer dans une phase de négociation sur de nouvelles bases et en se donnant le temps nécessaire pour des discussions sereines et approfondies. Le SEW/OGB-L espère que celles-ci vont aboutir à des propositions acceptables.

Les difficultés de l'enseignement et de l'éducation sont aujourd'hui bien réelles, on ne peut les aborder qu'avec beaucoup de créativité et d'engagement, ce qui n'est possible que dans un cadre qui offre les conditions de travail et les possibilités d'action adéquates.




monique Adam
présidente du SEW