Editorial: Quelle autonomie pour nos écoles?

05.02.2010

Depuis l’introduction de la nouvelle loi sur l’enseignement fondamental, les enseignants ont l’impression que l’école est en train de se transformer en un terrible appareil de contrôle.

Les enseignants se plaignent de plus en plus d’une réforme qui freine leur créativité, qui les éloigne de leurs élèves, qui change profondément la nature de leur travail.

Ils passent en effet de plus en plus de temps à analyser, à évaluer et à documenter tout aussi bien les activités des élèves que leurs propres activités d’enseignants. Ils produisent de plus en plus de rapports et de déclarations pour une bureaucratie qui est omniprésente et dont la principale finalité est le contrôle. Cela crée un profond malaise.

Ceux qui étaient les plus enthousiastes pour abandonner une évaluation basée sur des notes sont les plus choqués par ces tests multiples, ces observations incessantes, ces jugements permanents destinés à établir les bilans de compétences.

De même la concertation a été dénaturée par un formalisme excessif et par un contrôle continu, si bien que certaines équipes pédagogiques ont l’impression qu’elles se réunissent plutôt pour produire un rapport pour leur supérieur hiérarchique que pour organiser les apprentissages de leurs élèves. Les concertations réelles se font souvent en plus de ces réunions si bien que de nombreux enseignants estiment qu’ils ont déjà largement dépassé les 60 heures de concertation.

Même dans l’élaboration d’un plan de réussite scolaire, le Ministère de l’Education nationale a plutôt tendance à contrôler les écoles que de les encourager à exercer leur autonomie. Pourquoi ces questionnaires inquisiteurs, ces formulaires à remplir qui ne permettent aux écoles que de se situer dans leur conformité à des domaines de développement préétablis ?

Où est l’autonomie des écoles? Ne sont-elles pas étouffées par des prescriptions multiples? Ce n’est pas de cette façon qu’elles pourront développer leurs propres idées pour faire réussir leurs élèves. Le Ministère doit faire un choix dans la manière dont il veut diriger les écoles. D’un côté, il affirme vouloir diriger les écoles par «l’output» en accordant une certaine autonomie aux écoles et en les contrôlant par les résultats qu’obtiennent leurs élèves dans les tests nationaux et internationaux. Mais d’un autre côté, il entend contrôler en cours de route toutes les adaptations qu’elles mettent en place.

D’un côté les écoles ont la pleine responsabilité pour gérer la pénurie des remplaçants, mais de l’autre elles ne disposent pas d’une autonomie suffisante pour gérer leur propre fonctionnement, sans un contrôle tatillon par l’inspectorat. Cela crée du stress qui se répercute finalement aussi sur les élèves qui se sentent observés et évalués en permanence. Cela est malsain pour le bon fonctionnement de nos écoles.

Nous publions dans le présent Journal de nombreuses prises de positions qui reflètent ce malaise face à la bureaucratie. Il nous semble important de réagir face à cette menace qui est en train de dénaturer notre travail et qui ne contribue pas à améliorer les apprentissages des élèves, tout au contraire.

Les enseignants engagés qui ont soutenu la réforme parce qu’ils se sentent prêts à assumer des responsabilités importantes au sein de leur école tout en sachant que cela n’est pas facile se sentent frustrés par le manque de confiance de la part du MEN.


Monique Adam,
Présidente du SEW