Les discussions au sein de la Commission scolaire nationale: Quels contenus pour l’Education morale et sociale?

06.12.2010

Au cours de l’année 2009/2010 la CSN avait donné un avis sur les nouveaux manuels à utiliser au cycle 3 pour l’éducation morale et sociale. L’approche philosophique avait rencontré l’approbation de tous les membres de la Commission. Certains d’entre eux avaient des craintes concernant le degré de difficulté des textes retenus. Cependant, les représentants du SEW au sein de cette Commission avaient surtout une divergence de vues sur la place de la religion ou des religions au sein de ce manuel. Malheureusement cette place prépondérante se retrouve déjà dans le plan d’études, où les fêtes religieuses, ainsi que les rites et les traditions des grandes religions font partie des contenus d’apprentissage. Les représentants du SEW ont signalé que cette façon de procéder pourrait à la rigueur être acceptée, s’il s’agissait d’un cours unique à destination de tous les élèves.

Or l’EMS est actuellement un cours alternatif au cours d’instruction religieuse et morale de la religion catholique. Ainsi, l’école intègre d’une part un cours s’adressant aux élèves qui font partie de la confession majoritaire de la population luxembourgeoise (IRM) et d’autre part un cours regroupant les élèves n’appartenant à aucune religion ou encore à d’autres religions minoritaires sur le territoire luxembourgeois (EMS). Et voilà bien le dilemme du cours d’EMS, qui dans les dépliants d’informations adressés aux parents d’élèves en début d’année scolaire ne se distingue guère du cours d’IRM, hormis la référence à la confession catholique. Son contenu est effectivement organisé sur le modèle d’un cours général d’éthique regroupant les élèves de toutes les confessions et comme accessoirement les élèves non croyants. Ainsi les religions y sont très présentes, y compris les différentes religions chrétiennes. Alors que les représentants du SEW/OGBL approuvent pleinement l’orientation philosophique du cours d’EMS, ils sont cependant sceptiques quand à une démarche privilégiant l’éthique, surtout si celle-ci se base en priorité sur les analogies entre les différentes religions. Dans le matériel pour le cycle 3, la règle d’or qui veut qu’on ne fasse à autrui ce qu’on n’aimerait subir soi-même est illustrée à travers des commandements des religions plutôt qu’à travers des réflexions philosophiques.

Ce qui par contre est tout à fait inacceptable, c’est de mettre sur un pied d’égalité en tant qu’histoires de la création (Schöpfungsgeschichten) des croyances religieuses sur la création du monde et les résultats des recherches scientifiques sur le « big bang » et l’évolution des espèces.

Dans un premier temps la Commission scolaire nationale avait donc donné un avis défavorable à la publication des nouveaux manuels d’EMS pour le cycle 3. Or, Madame Delvaux intervenant en personne pour la publication de ces manuels, afin de combler un vide et d’offrir aux enseignants concernés un matériel tant soit peu adapté, la Commission s’est résignée à demander seulement le remaniement des pages les plus discutables, notamment sur la création et par ailleurs sur la présentation des athéistes ou agnostiques en évitant de les présenter de façon entièrement négative comme non-croyants et ne fréquentant aucune église. Par ailleurs, il a été convenu de recueillir l’avis des enseignants travaillant avec ce matériel pour le remanier ultérieurement.

Les représentants du SEW/OGBL auraient certainement préféré une réflexion approfondie avant toute publication. Ils se sont néanmoins résignés à accepter les fortes pressions pour publier le matériel élaboré jusque là. Cependant, ils estiment qu’il faut poursuivre la réflexion sur les deux volets de la problématique, à savoir le dilemme d’un cours s’adressant à toutes les confessions et aux non-croyants, alors qu’il existe un cours basé sur la confession catholique à côté; et par ailleurs la place pouvant être accordée aux religions dans un cours d’éducation morale et sociale. L’approche philosophique est intéressante, à condition de poursuivre cette démarche jusqu’au bout et de ne pas se limiter aux diverses éthiques et plus particulièrement à celles des croyances religieuses. Si le phénomène religieux a certainement sa place dans la culture et dans l’histoire de nos sociétés contemporaines, il ne pourra en aucun cas prétendre à remplacer des explications scientifiques. Il faudra rester vigilant sur le contenu du cours d’EMS, car face à deux cours d’éthique religieuse, une troisième option s’impose!


Monique Adam,
Membre de la direction syndicale