Passage primaire post-primaire: essayons de mener un débat serein !
La remise en question de la procédure d'orientation en 6e année d'études mise en place en 1996/1997 est évidemment une bonne nouvelle pour la plupart des instituteurs et institutrices titulaires des classes du degré supérieur de l'enseignement primaire. Cette procédure dont nous avions critiqué l'envergure dès le début s'est en effet avérée de plus en plus lourde pour les titulaires des 6e années d'études. En effet dans la procédure actuelle ce sont eux qui sont à l'écoute de l'élève et de ses parents, qui établissent le dossier de l'élève et le présentent aux parents, à l'inspecteur, aux professeurs et finalement au conseil d'orientation. Ils savent qu'ils ont une grosse responsabilité mais également un rôle très inconfortable à jouer quand les avis des parents divergent de ceux des professeurs ou de l'inspecteur. Normalement leur avis est déterminant au conseil d'orientation puisqu'ils ont la meilleure connaissance de l'élève, mais ce n'est pas toujours le cas et cela ne facilite pas le dialogue avec les parents, surtout dans les cas limites là où il serait le plus nécessaire. Dans cette situation, l'instituteur se sent souvent comme celui qui a des comptes à rendre de toutes parts et qui est pressé de donner son avis, mais qui peut aussi être désavoué. Cette situation inconfortable et une surcharge de travail considérable en ont convaincu plus d'un à abandonner le degré supérieur pour devenir titulaire d'une autre classe que d'une 6e année d'études. S'y ajoutent des épreuves standardisées souvent controversées dans leur contenu, mais plus souvent encore quant à leur déroulement (voir à ce sujet également la lettre de nos collègues de Lorentzweiler).
La proposition de Madame la Ministre de réformer cette procédure, générant des coûts non négligeables et souvent injustifiés, est donc la bienvenue. Encore faut-il savoir ce qu'on veut mettre à la place. Il y a dix ans, on était presque tous d'accords pour abolir l'examen d'admission qui avait des effets pervers sur les apprentissages de la 6e année d'études. Aujourd'hui bon nombre d'enseignants sont d'avis que la procédure actuelle pèse encore plus lourdement sur les apprentissages de la 6e année d'études. Il paraît donc utile de réfléchir à deux fois avant de mettre en place une nouvelle procédure. Au sein du SEW/OGBL un groupe de travail s'était largement penché sur la question il y a un certain nombre d'années. La discussion y avait porté sur une meilleure concertation entre les enseignants des différents ordres d'enseignement, celle-ci devant porter plutôt sur les programmes et les méthodes d'enseignement, aujourd'hui on y ajouterait les socles de compétences, que sur l'orientation d'un élève que les enseignants du post-primaire ne connaissent que par ouï-dire. Par ailleurs, tous étaient d'accords pour dire qu'une orientation en fonction de projets professionnels des élèves n'était pas envisageable à cet âge-là. L'orientation n'est alors possible que sur la base des perspectives de réussite d'un élève dans un ordre d'enseignement plus ou moins exigeant au vu de ses compétences en 6e primaire. Normalement la décision d'orientation devrait être prise d'un commun accord lors d'une concertation entre l'enfant, ses parents et le titulaire de la 6e année d'études. C'est d'ailleurs un fait dans l'immense majorité des cas. Restent toujours des situations où il y a désaccord et c'est la gestion de ces situations qui divise souvent les esprits. Le point de vue dominant au sein du SEW était toujours de respecter en fin de compte le choix de l'enfant et de ses parents, car on peut supposer que la très grande majorité d'entre eux se laisseront conseiller et prendront une décision appropriée sachant qu'ils devront en assumer la responsabilité. Néanmoins un certain nombre de collègues sont d'avis que ceci entraînera tôt ou tard un afflux massif d'élèves avec des performances trop faibles vers l'enseignement secondaire.
Il faudra reprendre les discussions en considérant les réformes proposées dans le cadre de la nouvelle loi sur l'enseignement primaire et l'élaboration des socles de compétence et en veillant toujours à ce que les solutions envisagées pour les cas litigieux n'entraînent pas des mesures susceptibles de perturber le déroulement des apprentissages pour la majorité des élèves.
Journal 4/2006