Journal 1/2009: Les changements concrets (Monique Adam)

Après le vote des lois sur l'enseignement fondamental et sur le SCRIPT beaucoup de questions se posent sur leur mise en œuvre. Les enseignants sur le terrain se demandent évidemment ce qui va changer concrètement à partir de la rentrée prochaine. Le SEW/ OGBL est en train d'organiser des réunions d'information en essayant de donner les réponses aux questions qui ont été élucidées jusqu'à présent et pour collecter les préoccupations qui attendent encore une réponse. Bien des points restent encore à clarifier et des règlements grand-ducaux sont en train d'être élaborés pour définir les détails de leur mise en application. Nous avons publié dans notre dernier numéro un certain nombre de règlements avec les avis du SEW/ OGBL et lors de nos entrevues avec Madame Delvaux et ses conseillers, il a été convenu que certains amendements y seraient encore apportés. Ainsi les comités d'école auront la possibilité de déterminer eux-mêmes le nombre exact de leurs membres pourvu qu'il se situe entre 3 et 9. Une certaine ouverture semble également se dessiner sur l'affectation des leçons d'appui. De même les leçons assurées dans le cadre de la LASEP et qui n'étaient honorées que très sommairement pourront enfin être intégrées dans la tâche des instituteurs et institutrices, comme c'est le cas depuis longtemps pour les enseignants du secondaire. Le SEW/OGBL salue ces ouvertures qui semblent enfin accorder une importance égale à ces activités qu'elles soient assurées au niveau du secondaire ou au niveau du primaire. Il est assez optimiste de trouver des accords similaires pour les activités au niveau des bibliothèques scolaires, d'Art à l'Ecole, de la MUSEP, des nouvelles technologies de l'information et de la communication, des ateliers scolaires, ainsi que du délégué à la sécurité. Il est important que toutes ces activités soient enfin reconnues et que leur prise en charge ne reste pas soumise à des initiatives de certaines communes ou l'engagement quasi bénévole de certains enseignants.
Par contre, le problème essentiel reste celui des moyens mis à disposition des comités d'école et des comités de cogestion pour remplir leurs diverses missions. Il est clair que le volume de leçons supplémentaires (0,015 fois le nombre de leçons attribuées à la commune par le contingent) est totalement insuffisant pour mener à bien les tâches incombant à ces comités. Face aux revendications de moyens supplémentaires pour les comités, la Ministre de l'Education nationale propose d'accorder le grade E5bis aux présidents des comités d'école. Pour le SEW/OGBL, ce n'est pas vraiment la bonne solution au problème qui se pose, et nous avons demandé de transformer cet investissement en leçons supplémentaires à accorder aux comités. On pourrait même convenir qu'un tiers de ces leçons devraient être prestées comme heures supplémentaires au cours des 5 prochaines années, afin d'éviter le recours à des chargés de cours supplémentaires. Néanmoins le MEN ne semble pas prêt à négocier sur ce point, ce qui posera un tas de problèmes au bon fonctionnement des comités. Tout d'abord, cette disposition ne profitera qu'aux collègues n'ayant pas encore atteint l'âge de 55 ans. Ainsi tous les instituteurs et institutrices âgés de plus de cinquante ans sont priés de ne plus postuler pour le poste du président du comité, car ils auront le grade E5bis de toute façon au cours des 5 prochaines années et la prime accordée au comité pour son fonctionnement tombera alors en désuétude. Il s'agira donc de jongler avec les leçons supplémentaires et avec le grade bis en vue de garantir une répartition tant soit peu équitable face aux tâches à accomplir. Il faut cependant compter sur un très fort sens des responsabilités parmi le personnel enseignant pour éviter que ces dispositions ne deviennent la première pierre d'achoppement au bon fonctionnement des comités.
Malgré toutes ces difficultés, les enseignants du fondamental sont largement motivés pour assumer une part croissante des responsabilités dans le cadre d'une plus grande autonomie 3accordée aux écoles. C'est l'espoir de pouvoir enfin réaliser des projets élaborés sur le terrain au contact des problèmes concrets des élèves. Il n'est pas sûr que ces projets aboutissent tout de suite, car il faut dire aussi que les idées sur les bonnes pratiques diffèrent largement entre les enseignants. On constatera certainement par endroits des tendances à se regrouper entre partisans d'une même idée, car ceci permettra évidemment de mettre plus rapidement en œuvre un projet concret. Par ailleurs, il n'est pas certain que des équipes partageant des points de vue plus diversifiés et mettant forcément plus de temps à trouver un dénominateur commun ne parviennent à mettre sur pieds des projets moins performants. Une réforme pédagogique ne se fera pas en un jour, ni en un an, n'en déplaise aux impatients. Ceux qui pensent qu'il faut faire tout autrement risquent de voir revenir le tour du pendule plus vite qu'ils ne pensent. Beaucoup d'instituteurs et d'institutrices connaissent ces expériences réalisées dans le passé où ils ont vu la terre ferme se dérober sous leurs pieds quand ils avançaient trop vite dans la réorganisation de leurs classes. Ils ont vite appris à intégrer prudemment de nouveaux points de vues et de nouvelles techniques dans leurs pratiques éprouvées pour avancer d'un pas plus assuré. Le travail en équipe offre des chances supplémentaires pour sélectionner effectivement les pratiques offrant les meilleures chances de réussite. Il faut espérer que le MEN réalise qu'il y a là une chance à saisir et qu'il n'essaie pas de les mettre tout de suite sous la tutelle de soi-disant experts du SCRIPT, de l'Université ou d'ailleurs. Certes un projet n'est pas forcément bon parce qu'il a été élaboré à la base, mais inversement son élaboration par des experts ne garantit pas qu'il soit meilleur.
Lors de la présentation de ses vœux du Nouvel An, Madame Delvaux a annoncé que les temps nous apprenaient qu'on ne pouvait plus faire confiance aux experts. Les lois votées à la Chambre des Députés font malheureusement encore preuve du contraire. En étoffant l'inspectorat et le SCRIPT, en confiant l'évaluation des écoles à une unité de recherche de l'Université, beaucoup d'investissements vont vers la superstructure. Si, par ailleurs le partenariat au niveau des écoles et l'engagement des enseignants dans leurs comités ne doivent pas rester lettre morte, il faudra leur accorder une influence réelle et les moyens matériels qui vont avec.
Monique Adam,
Présidente du SEW