Avis du SEW/OGBL sur les avant-projets de règlements grand-ducaux déterminant les modalités d'évaluation des élèves ainsi que le contenu du dossier d'évaluation et celui fixant le plan d'études pour les quatre cycles de l'enseignement

Tout d'abord le SEW/OGBL constate que dorénavant l'évaluation ne comporte plus de comparaison entre les élèves d'une classe, puisqu'elle tend à adapter les tests aux capacités des élèves. Par contre, elle tend à introduire une nouvelle voie de compétition qui est celle à la validation des compétences en vue de progresser le plus rapidement à travers les cycles. Le SEW/OGBL était toujours très sceptique sur la possibilité du passage d'un cycle en une année. On nous a toujours rassurés pour dire que c'étaient des situations tout à fait exceptionnelles. À la lecture du règlement grand-ducal déterminant les modalités d'évaluation des élèves ainsi que le contenu du dossier d'évaluation, il devient cependant de plus en plus évident qu'il est possible d'entrer au cycle 2 à 5 ans et de faire le passage au postprimaire à 8 ans. Ainsi, une nouvelle logique est introduite: pour se situer parmi les meilleurs, il faut être parmi les plus rapides. Même si un grand nombre d'élèves continuent à traverser les cycles au rythme de deux (voire trois) années par cycle d'apprentissage, il devient de plus en plus évident que les élèves les plus forts seront incités à passer le plus rapidement d'un cycle à l'autre. Ces élèves passeront donc un minimum de temps avec les autres. Ils ne se sentiront pas vraiment intégrés dans les classes et noueront probablement peu de liens avec leurs camarades. Leurs parents insisteront auprès des enseignants à ce que leurs enfants acquièrent le plus rapidement possible les compétences qui les feront avancer au cycle suivant. Il en résultera une pression plus forte sur les enseignants pour différencier les apprentissages au sein d'une classe. Cela créera encore plus de stress et cela conduira inévitablement à la création de groupes de niveaux pour faire progresser les élèves le plus rapidement possible, sans tenir compte des apprentissages multiples et très fructueux qui se font dans des groupes hétérogènes, mais qui ne sont pas axés sur une progression linéaire dans telle ou telle compétence visée.
Fini les temps où les plus forts aidaient les plus faibles pour qu'on puisse avancer ensemble. Fini les temps où on pouvait se sentir solidaires parce qu'on avait passé ensembles au moins les 6 années de l'école primaire et parce qu'on avait vécu ensembles bien des expériences communes. Déjà les activités communes au sein des classes ont tendance à se faire de plus en plus rares, les élèves travaillant par groupes pas toujours hétérogènes et individuellement parce que chacun doit progresser à son rythme. Si cela devait être le cas, le mieux serait évidemment de prévoir un enseignant par élève. Chez les enseignants cela revient à revendiquer des effectifs de classe de plus en plus réduits, parfois au delà du raisonnable d'un point de vue dynamique de groupe. Mais, c'est que la dynamique du groupe ne semble plus être notre souci principal.
Comment développer dans un tel contexte les compétences transversales, surtout dans le domaine des attitudes relationnelles? D'ailleurs ces compétences ne sont plus reprises dans les socles de compétences et il n'en sera certainement pas tenu compte.
Par ailleurs, les compétences à valider pour chaque cycle sont tellement nombreuses qu'on imagine mal comment on pourrait les évaluer sérieusement pour chaque élève, surtout si l'on doit documenter une certaine progression à travers le cycle. On risque d'aboutir à des évaluations incessantes qui ne laisseront plus assez de temps à des activités de découverte, de lecture pour le plaisir et de discussion. Si par contre cette évaluation est faite au pif, elle devient encore plus contestable que les formes d'évaluation actuelles. Il faudrait donc réduire le nombre de compétences à valider. Que fera-t-on d'ailleurs pour les élèves qui ont de bonnes compétences en général, mais n'arrivent pas à valider certains des items contenus dans le socle? Ne faudrait-il pas se limiter à décrire une compétence complexe à valider par domaine de compétence?
Le SEW/OGBL estime qu'il faudrait limiter le nombre de compétences à atteindre par cycle et les décrire de façon plus concrète. Par ailleurs, il faut veiller à ce que le passage du cycle se fasse en deux ans, sauf dans des situations tout à fait exceptionnelles et que l'équipe pédagogique ne soit pas tenu à préparer des élèves au passage du cycle en un an. Cela conduirait inévitablement à la création de groupes de niveaux et à une concentration des efforts sur les élèves les plus forts au détriment des plus faibles.
En fin de compte le SEW/OGBL demande de retarder l'introduction d'un nouveau plan d'études et des nouvelles formes d'évaluation d'au moins une année, afin de pouvoir les discuter sereinement avec tous les partenaires.