Nº 1535 Taux d'abandon et d'échec dans les cours de luxembourgeois pour adultes (30/01/2007 Félix Braz) Q/R

30.01.2007

Monsieur le Président,
Conformément à notre règlement interne, je me permets de poser la question parlementaire suivante à Madame la Ministre de l'Education nationale et de la Formation professionnelle.
La résolution adoptée par le congrès des associations d'étrangers fin novembre 2006 énonce: Le congrès considère " que le taux d'abandon et d'échec très élevé dans les cours de luxembourgeois pour adultes est un luxe que le pays ne peut pas se permettre. "
J'aimerais dès lors savoir:
  • Quel est le taux d'abandon et d'échec dans ces cours de luxembourgeois?
  • Quel est le taux d'abandon et d'échec dans les autres cours de langue offerts par le Centre de Langues Luxembourg?
  • Qu'est-ce que le Ministère de l'Education nationale et de la formation professionnelle entend entreprendre pour améliorer le taux de réussite?

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs.


Felix Braz
Député






Réponse de la Ministre de l'Éducation nationale et de la Formation professionnelle à la question parlementaire N° 1535 de Monsieur le Député Félix Braz :
Le congrès des associations d'étrangers qui s'est tenu fin novembre 2006 parle dans sa résolution « d'un taux d'abandon et d'échec très élevé dans les cours de luxembourgeois pour adultes» en stipulant que ceci « est un luxe que le pays ne peut pas se permettre ».

Ad1) Si l'on analyse les données de l'année scolaire 2005-2006, les cours de luxembourgeois au Centre de langues Luxembourg ont été fréquentés par 1422 personnes ce qui représente 19% de l'effectif total des apprenants du Centre de langues Luxembourg. Sur ces 1422 apprenants, 432 dossiers ont abandonné avant la fin du cours, soit 30%.


2005/2006
Nb d'inscriptions
Abandons
Allemand
1052
14%
285
27%
Anglais
1134
15%
235
21%
Français
2891
39%
694
24%
Luxembourgeois
1422
19%
432
30%


Il faut savoir qu'ici nous sommes en présence de taux d'abandons absolument comparables, sinon inférieurs à ceux que l'on retrouve dans la formation des adultes à l'étranger. Les raisons de l'abandon sont multiples et ne signifient pas nécessairement qu'il y a eu échec:
  • insertion professionnelle (peut signifier une réussite)
  • déménagement à l'intérieur du pays ou vers l'étranger
  • problèmes personnels et familiaux (accident, maladie, grossesse, divorce, garde d'enfants ou de personnes malades)
  • sous-estimation du temps requis pour l'apprentissage d'une langue
  • manque de capacités d'apprentissage chez les personnes peu scolarisées
  • manque de motivation


En ce qui concerne l'échec, il est un fait qu'au CLL, il n'y a pas d'échec à proprement parler. En effet, un apprenant s'engage dans un parcours de formation. Après avoir été testé et conseillé par un des enseignants du Centre de langues, il entre dans une classe en fonction de ses capacités en langue et de ses besoins. Il s'engage, pour un semestre dans un parcours de formation. Tout au long de ce parcours, il sera régulièrement amené à évaluer ses performances et, à la fin du semestre, se verra proposer une évaluation de ses compétences. En fonction de ses résultats, il pourra réviser son parcours de formation de plusieurs façons: le poursuivre dans un niveau supérieur, rester dans le même niveau, choisir de remédier à des difficultés spécifiques ou de combler des besoins précis dans un module plus spécialisé.

Dans une telle perspective, le Centre garde une trace du parcours de chacun de ses apprenants mais n'enregistre pas de critère de réussite ou d'échec.

Il est vrai que les apprenants du Centre de langues sont des adultes et que passer un test peut leur poser plus problèmes qu'à des jeunes. D'ailleurs, un petit pourcentage d'entre eux ne souhaite pas se présenter au test de bilan de fin de semestre. Tout d'abord par le fait qu'ils ne se sont plus présentés à un test depuis de nombreuses années, mais également parce que les réminiscences liées aux tests passés durant l'enfance ou l'adolescence sont vécues de façon négative. Malheureusement, l'ancrage psychologique négatif prend le dessus par rapport au raisonnement de sorte qu'il est dès lors très difficile de faire comprendre aux apprenants qu'au Centre de langues on évalue de façon positive en regardant ce que l'apprenant sait faire et non pas quelles sont ses erreurs.

Ad 3) Le Centre de langues s'est engagé à dispenser un enseignement de qualité en adoptant une démarche actionnelle de l'enseignement des langues et en encourageant l'innovation pédagogique dans la perspective du Cadre européen commun de référence pour les langues. Les travaux d'adaptation des cours et de l'évaluation au Cadre européen commun de référence se poursuivent et vont encore prendre un certain temps. Il ne s'agit pas de greffer une nouvelle dénomination à des échelles existantes, mais il faut redéfinir les contenus des cours en veillant à les caler sur les objectifs définis par le Cadre européen commun de référence, à harmoniser l'offre de cours en respectant les spécificités de chaque langue enseignée et les attentes des apprenants. Il est certain que ces attentes sont différentes d'un cours à l'autre et, très souvent, d'un apprenant à l'autre. L'objectif visé par les apprenants des cours de français est surtout une intégration professionnelle tandis que dans les cours de luxembourgeois, l'objectif est très souvent lié à une intégration sociale et de plus en plus également une intégration économique, surtout pour les métiers du secteur paramédical. Pour ce qui est des autres cours, l'objectif est soit d'apprendre une langue en sus ou de parfaire des compétences langagières existantes pour raisons professionnelles ou personnelles.

L'enjeu lié à l'apprentissage d'une langue influe grandement sur la motivation d'apprendre la langue. Pour ce qui est de l'apprentissage du luxembourgeois, nombre d'apprenants se plaignent que leur effort n'est pas apprécié à sa juste valeur par nos compatriotes. Dès qu'ils essaient de parler notre langue, les Luxembourgeois au lieu de les encourager à parler le luxembourgeois, changent de registre et s'adaptent à leur interlocuteur en parlant le français, l'allemand ou l'anglais. Il est évident qu'un tel comportement ne contribue pas à la motivation de ceux et celles qui se sont engagés à apprendre la langue du pays.

Mady Delvaux-Stehres
Ministre de l'Éducation nationale et de la Formation professionnelle