Un cas d’école pour le fonctionnement du dialogue entre le MEN et les syndicats

En octobre 2010, une première édition des épreuves standardisées au cycle 3.1 a eu lieu. A l’époque, le SEW/ OGBL avait protesté de façon véhémente contre le contenu des épreuves et les différents questionnaires qui les accompagnaient. Je vous invite à relire dans Journal 4/2011 nos critiques de l’époque qui gardent toute leur actualité. Devant la menace d’un boycott et suite à une réunion d’urgence avec les syndicats, les questionnaires ont été retirés et il a été décidé de n’utiliser l’évaluation des épreuves que pour l’établissement d’un nouveau plan d’études. On aurait donc pu croire que nos arguments avaient convaincu la Ministre.
Or, quelle était notre stupéfaction quand les collègues des cycles 3.1 ont été appelés à passer des épreuves quasi identiques avec des questionnaires encore plus sophistiqués à leurs élèves. Nulle information préalable sur ces épreuves n’avait été adressée aux syndicats et pour cause, car nous n’aurions jamais donné notre aval à cette démarche. Prévenue par mes collègues du cycle 3.1, j’ai assisté à une réunion d’information où j’ai réitéré les inquiétudes que mon syndicat avait déjà exprimé en 2010. Quelques semaines plus tard, les épreuves et les questionnaires sont parvenus aux titulaires du cycle 3.1 avec des consignes de stricte confidentialité.
Est-ce que le MEN est conscient de ce qu’il est en train de faire ? Est-ce que les parents d’élèves savent ce qui se passe ? A travers des questionnaires croisés s’adressant aux différents acteurs, c’est un système digne de l’inquisition qui se met en place. Si l’on demande aux élèves de répondre à des questions sur le confort ou l’équipement technologique de leur foyer, est-ce parce qu’on ne se fie pas aux réponses données par les parents ? Toute cette collecte de données organisée de façon de plus en plus poussée est un vrai scandale. On essaie évidemment de nous rassurer en disant que cela se fait de façon absolument anonyme. Or, la plupart des enseignants ont de forts doutes sur cet anonymat, puisqu’on leur demande d’envoyer une liste de leurs élèves avec les codes qu’ils leur ont attribués au MEN. Et même si l’anonymat était garanti. Combien coûtent toutes ces enquêtes et à quoi servent-elles? À prouver une fois de plus que le milieu socio-économique a une influence certaine sur les résultats scolaires des élèves! Pourquoi ne pas employer cet argent pour mettre en place des mesures d’aide pour les élèves issus de milieux défavorisés?
Cette fois il est prévu explicitement de donner un feedback aux parents d’élèves sur les résultats de leurs enfants, aux titulaires et aux écoles sur les résultats de leurs élèves. Cela mènera inévitablement à un ranking des écoles avec pour conséquence directe un tourisme scolaire et une ghettoïsation des écoles. Le MEN a été prévenu de cet effet inévitable, mais il persiste néanmoins à vouloir l’organiser. Est-ce sous la pression des bureaucrates néolibéraux qui veulent donner une chance aux écoles privées?
Les enseignants qui défendent l’école publique ne sont pas entendus. C’est bien de cette façon que fonctionne le dialogue! À constater cela, les syndicats seront amenés à organiser des boycotts et des manifestations véhémentes pour être entendus!
Membre de la direction syndicale