Frais d'ordinateur - L'affaire est portée devant le tribunal administratif

Les antécédents
Depuis l'année fiscale 2006, l'Administration des Contributions directes refuse de déduire les frais en relation avec l'ordinateur personnel comme frais d'obtention du revenu net des enseignant(e)s.
Une circulaire dans ce sens a été adressée à tous les bureaux d'imposition par le nouveau directeur en place. Suivant l'argumentation de l'administration fiscale, l'ordinateur serait aujourd'hui un bien commun et les dépenses en question seraient effectuées dans l'intérêt du ménage du contribuable et pour l'entretien des membres de sa famille. Une déduction à titre de frais professionnels pour enseignant(e)s ne serait donc plus admissible.
Il s'entend que le SEW n'accepte pas cette argumentation pour la pure et simple raison que l'ordinateur constitue aujourd'hui pour tout-e enseignant-e un instrument de travail quotidien indispensable pour préparer et rédiger les cours et devoirs, pour faire des recherches sur Internet dans l'intérêt de son activité professionnelle et pour gérer le courrier électronique professionnel, notamment celui en provenance du MENFP. En résultent donc des dépenses typiques en relation directe avec l'exercice de la profession enseignante, dépenses réalisées en vue d'acquérir, d'assurer et de conserver les recettes de l'occupation salariée, ce qui correspond bien à la définition des frais d'obtention.
Par ailleurs, en Allemagne, pays fondateur du droit fiscal luxembourgeois, l'ordinateur et ses frais ccessoires (logiciels, papier, toner) restent déductibles pour les enseignant-e-s.
Par conséquent, le SEW a recommandé à ses membres de continuer à déclarer leurs frais d'obtention en relation avec l'ordinateur et d'introduire dans un délai de trois mois un recours contre la décision d'imposition, à compter de la réception du bulletin de l'impôt sur le revenu, par l'envoi d'une lettre de réclamation au directeur des Contributions directes. Une lettre modèle dans ce sens est à disposition sur notre site www.sew. lu.
La «décision sur réclamation» du directeur
des Contributions directes
Le directeur des Contributions directes a réagi à ces lettres par une «décision sur réclamation» de 4 pages, adressée individuellement aux requérant-e-s, dans laquelle il justifie sa démarche. En bref, son raisonnement est le suivant:
- il n'est pas contesté que le/la contribuable en question utilise son ordinateur de façon prépondérante pour de multiples tâches en relation avec son emploi et que l'acquisition a été motivée également par des raisons professionnelles
- le/la contribuable doit prouver qu'il ou elle utilise l'ordinateur à raison de 90% pour des activités professionnelles
- il existe une interdiction de ventilation à défaut de critères objectifs permettant une telle ventilation
- des critères objectifs font défaut ici et le ou la contribuable doit donc prouver qu'il n'utilise pas l'équipement dans sa vie privée
- le/la contribuable n'a pas fourni cette preuve et partant les frais d'ordinateur ne sont pas déductibles.
Ainsi l'administration reconnaît d'une part que l'enseignant -e en question utilise son PC de façon prépondérante à des fins professionnelles. D'autre part, elle demande qu'il ou elle prouve une utilisation minimale à raison de 90 % pour pouvoir bénéficier de la déductibilité. Finalement la «décision sur réclamation » postule que la loi interdirait de ventiler ces frais, puisque il n'y aurait pas de critères objectifs permettant cela et demande donc que l'enseignant-e utilise son PC à des fins professionnelles à raison de de 100% pour pouvoir en déduire les frais de son revenu brut.
Cette logique laisse perplexe et elle fait surgir nombre de questions:
- d'où proviennent les 90 %? sont-ils inscrits dans la loi? dans la jurisprudence? le directeur des Contributions peut-il librement inscrire ce pourcentage dans ses circulaires internes? ne devrait-on pas plutôt accepter que du fait d'une tranche d'imposition maximale de 38 % actuellement inscrite dans la L.I.R,.une utilisation à des fins privées de l'ordre de 62 % serait tolérable?
- l'interdiction de ventilation à défaut de critères objectifs est-elle inscrite dans l'article 12 de la L. I. R.?
- le directeur des Contributions directes peut-il décider de son plein gré que des critères objectifs n'existeraient pas dans le cas sous revue? le degré d'utilisation du disque dur à des fins professionnelles ne serait-il pas un critère objectif? quels critères «objectifs» sont couramment utilisés lors de l'utilisation d'autres équipements comme par exemple la voiture «Porsche» privée d'un chef d'entreprise?
- est-il admissible que par le truchement de l'interdiction de ventilation à défaut de critères objectifs, on aboutisse à un blocage total de la déductibilité d'un équipement, même si on l'utilise à 99 % à des fins professionnelles?
ne s'agirait-il pas ici d'un abus d'interprétation de la part de l'administration fiscale?
Une perte de revenu inadmissible pour les enseignant-e-s
Nous pensons que le nouveau directeur des Contributions directes n'agit certainement pas ainsi sans l'appui de son supérieur hiérarchique c'est-à-dire, le ministre des Finances et nous percevons cette façon de procéder comme un coup monté contre la profession enseignante.
Les enseignant-e-s, contrairement à d'autres professionnels, financent leur outil de travail par leurs propres moyens, or en refusant de tenir compte de cette réalité, le ministre des Finances et le gouvernement diminue en fait leur revenu disponible après impôts.
Dans le but de protéger ses membres contre cette perte de revenu intolérable, le SEW - en concertation avec le département juridique de l'OGBL - a décidé de porter l'affaire devant le tribunal administratif.
Un avocat a dores et déjà été chargé du dossier.
Luxembourg, le 16 septembre 2008