Le contingent: résister contre une dégradation de la qualité de l’école publique

19.06.2010

Dans la dernière édition de notre journal, nous nous étions opposés fermement à une diminution de la globalité des leçons d’enseignement au niveau national. Entretemps les communes et les écoles ont finalisé leur organisation scolaire et les enseignants ainsi que les autorités communales ont pu se rendre compte des effets néfastes qui les attendront dans les années à venir. Par le jeu des leçons supplémentaires attribuées dans le cadre de l’éducation morale et sociale, ce qui n’est autre qu’une concession supplémentaire au clergé, les effets ne se feront sentir en général dans les communes de moyenne envergure dans les trois à quatre années à venir.

Rares sont en effet les écoles qui peuvent attendre une légère augmentation des leçons d’enseignement. La tendance est plutôt à un nivellement vers un niveau très bas.

Le SEW/OGBL persiste à exiger une transparence des chiffres du contingent. Jusqu’à présent le ministère n’a pas donné suite à la demande de publier les chiffres globaux de la variation des leçons d’enseignement. Il faut admettre que les comités d’école étaient trop occupés à redresser les erreurs qui s’étaient glissées dans les calculs effectués par le responsable du MEN de sorte qu’ils ne voyaient aucune chance de faire corriger le contingent proposé par le MEN. Face aux demandes émanant de quelques communes, le ministère se montra d’ailleurs implacable. A notre connaissance aucune n’exception ne fut faite.

Rappelons dans ce contexte qu’il ne faut pas confondre le problème des leçons d’enseignement avec la pénurie d’enseignants brevetés. Il reste d’actualité que le SEW/ OGBL demande l’engagement d’un maximum d’enseignants brevetés pour pouvoir garantir la qualité de l’école publique. Vouloir résoudre la pénurie par une diminution des leçons d’enseignement ne peut être une solution envisageable.

Il est cependant vrai que l’introduction du contingent, contrairement à ce qu’on pourrait croire, ne réduit pas les coûts de l’Education. La mise en place des équipes multiprofessionnelles et la nomination d’instituteurs-ressources va engendrer des dépenses supplémentaires considérables. Or dans la plupart des arrondissements les enseignants se montrent désenchantés, car contrairement aux objectifs annoncés, les équipes multiprofessionnelles ne fonctionnent toujours pas convenablement et n’interviennent que trop rarement dans les classes. Il en a même qui à l’heure actuelle refusent de faire passer des tests à certains enfants, même à la demande des parents. Quant aux instituteursressources, il faut se poser la question qu’il ne serait pas plus judicieux d’éviter une réduction des leçons d’enseignement en les déchargeant, mais de les laisser enseigner dans leurs classes au lieu de les engager à contribuer à résoudre des problèmes créés par une augmentation des effectifs de classe et l’abolition des mesures d’appui (dues en partie à leur décharge).

Les modèles de bonnes pratiques, comme les teamteaching et autres mesures d’encadrement pédagogiques, mis en place pour aider surtout les élèves les plus faibles, semblent condamnés à moyen terme. Ceci est d’autant plus incompréhensible qu’il s’agit de ces projets modèles que le Ministère de l’Education nationale a toujours mis en vitrine avec beaucoup de fierté. Ils devaient servir comme exemple aux autres écoles. Le ministère semble d’ailleurs s’être rendu compte de l’absurdité de la situation: un film réalisé par des professionnels pour le MEN où ces bonnes pratiques sont présentés reste sous scellés. Le film est finalisé, mais les copies ne sont pas distribuées, même pas aux enseignants ayant fait une contribution lors du tournage.

Or il faut redresser la barre! Les représentants des parents d’élèves se rendront vite compte que la réalité sur le terrain ne correspond plus à ce qui leur a été proposé lors de la présentation de la réforme scolaire. Différencier davantage l’enseignement et proposer une prise en charge plus individualisée de chaque élève ne pourront jamais se faire avec une réduction des leçons d’enseignement. Les comités d’école ne tarderont pas à en informer les représentants des parents pour s’allier en cette circonstance.

Si une grande majorité des communes semblent s’être resignées à leur sort, il en reste d’ailleurs des irréductibles qui ne sont pas prêts à accepter la dégradation de leur situation scolaire. Les responsables politique de la Ville de Differdange ont à l’unanimité des voix accepté une organisation scolaire avec un nombre de leçons identique à celui des années passés, mais dépassant quand même d’une façon non négligeable le contingent attribué par le MEN. Leurs arguments sont de taille: les écoles de Differdange ont proposé au cours des dernières années nombre de pistes pédagogiques que le MEN abolirait maintenant sans même les avoir fait évaluer. Nous attendons avec impatience la réaction du MEN.

Que ceci serve de modèle et d’encouragement à d’autres communes!


Patrick Arendt
Membre de la direction syndicale