Le rapport de planification des besoins en personnel enseignant du postprimaire de 2008/09 à 2012/13

Le rapport de planification des besoins en personnel enseignant de l'enseignement postprimaire pour la période 2008/2009 à 2012/2013, établi par une commission d'experts 1 contient toute une série d'informations intéressantes.
La répartition des tâches d'après le statut des enseignants au cours de l'année scolaire 2007-2008 a été la suivante:
Tâche des enseignants par statut (2007-2008) 2:

On constate que les titulaires n'assurent plus que 60,73 % des leçons, contre 6,30+16,31=22,61% des leçons données par des chargés d'éducation. Par rapport à 2006- 20073, la part des leçons effectives assurées par les titulaires a encore régressé de 1,44 %.
Cette baisse relative s'explique par un nombre élevé de départs à la retraite ainsi que par un nombre élevé de candidats qui ne présentent pas leur travail de candidature dans les délais (132 personnes en 2006-2007). A noter aussi que le pourcentage de leçons assurées par des chargés à durée déterminée a encore augmenté en 2007-2008, puisqu'il représentait 5,96 % en 2006-2007.
Mais le nombre de titulaires n'a pas seulement diminué en chiffres relatifs; le graphique suivant 4 montre la baisse absolue du nombre de titulaires à tâche complète au cours de la dernière décennie; il faut dire qu'une telle évolution est particulièrement négative pour la qualité de l'enseignement, cela d'autant plus si on tient compte d'une augmentation parallèle de 21,7% du nombre d'élèves dans l'enseignement postprimaire au cours de la même période5.

Comment le rapport voit-il les besoins futurs en personnel enseignant ?
Un certain nombre de facteurs font accroître les besoins:
- Le rapport table sur une augmentation de 700 élèves en moyenne par an6, ce qui donnera lieu à 425 postes supplémentaires en l'espace de 5 ans.
- Il estime comme suit les départs à la retraite: 2008/09: 137 postes; 2009/10: 130 postes; 2010/11: 125 postes; 2011/12: 115 postes; 2012/13: 112 postes, soit 619 postes au total.
- Il tient compte d'un accroissement des congés pour travail à mi-temps et du service à temps partiel, dû en partie à l'accroissement du pourcentage d'enseignants de sexe féminin (47,36% en 2007/08), à raison de 5 postes supplémentaires par an.
- L'obligation scolaire fixée à 16 ans (20 postes), les réformes scolaires (12 postes) et la construction de nouveaux établissements (5 postes) sont d'autres facteurs qui tendent à accroître les besoins.
Parmi les facteurs qui résorbent les besoins figure la nouvelle réglementation de la tâche. Le gain en postes dû à ce facteur est chiffré comme suit par le rapport: 2008/09: 55 postes; 2009/10: 67 postes; 2010/11: 80 postes; 2011/12: 92 postes, 20012/13: 93 postes7. Quant aux conséquences de l'arrêt de la Cour administrative concernant les CDD et CDI des chargés d'éducation, le rapport conclut que les besoins en postes d'enseignants fonctionnaires vont diminuer de 40 postes par an, soit de 200 postes au cours de la période quinquennale considérée.
La confrontation des deux types de facteurs (d'accroissement et de résorption des besoins) conduit au tableau ci-dessous; à noter que le rapport 2008-2013 aboutit à un besoin total de 260 postes à l'horizon 2012/13, alors que le rapport précédent avait conclu sur un manque de 213 postes en fin de période.

Ce total des besoins se chiffrant à 260 postes en 2012/13 constitue le besoin résiduel après la réalisation du plan de recrutement quinquennal de 960 postes arrêté par le gouvernement début septembre 2007. Les auteurs du rapport en concluent: « Afin de subvenir aux besoins […], un recrutement plus important que celui prévu […] serait nécessaire […]. A défaut de procéder à une correction des autres paramètres en rapport avec les besoins en personnel enseignant (augmentation des effectifs de classe, augmentation de la tâche des enseignants, diminution notable des décharges, suppression des redoublements, …), le recours à de nouveaux chargés d'éducation restera indispensable pour couvrir les besoins en personnel enseignant dans les cinq années à venir. »
Il faut remarquer que ce programme de recrutement arrêté en septembre 2007 avait consisté en une reconduction de l'ancien programme de recrutement 2006-2011, décalé d'une année. A ce moment déjà, le gouvernement avait refusé de tenir compte d'une mise en garde similaire lancée par les auteurs du rapport 2007.
Depuis le dépôt du rapport de planification de 2008, il ne s'est rien passé en la matière au niveau gouvernemental et le plan de recrutement arrêté en 2007 reste en vigueur. Faut-il en conclure que le gouvernement mise sur le recrutement de nouveaux chargés d'éducation et/ou sur les mesures évoquées par les auteurs du dernier rapport de planification, qui sont l'augmentation des effectifs de classe, l'augmentation de la tâche des enseignants, la diminution des décharges, la suppression des redoublements, … pour couvrir les besoins en personnel enseignant dans le postprimaire? Il s'entend que le SEW refuse ces issues nuisibles tant pour la qualité de l'enseignement que pour les conditions de travail des enseignants. Nous exigeons que le nouveau programme de recrutement quinquennal tienne compte des besoins réels et qu'il soit fortement augmenté!
En fonction du plan de recrutement arrêté le 03/10/2007 par le gouvernement, la commission a réparti comme suit les besoins prévisibles sur les différentes disciplines:

Or, ces chiffres ne correspondent pas au recrutement effectif lors des concours. En effet, du fait des besoins non couverts par le programme de recutement arrêté en 2007, le rapport évoque « un recrutement supérieur aux chiffres indiqués dans les disciplines pour lesquelles les horaires prévoient un nombre élevé de leçons (langues, mathématiques) ou dans lesquelles beaucoup de titulaires approchent l'âge de la retraite (biologie, chimie, histoire, enseignement préparatoire …) » et un recrutement inférieur « pour d'autres disciplines où le nombre de chargés d'éducation CDI est élevé (éducation artistique) ou dont le nombre de leçons d'enseignement diminuera en raison d'une réorganisation des cours (sciences économiques et sociales …) »
Il faut dire qu'une telle gestion de la pénurie aux dépens des branches qui voient ainsi diminuer leur recrutement par rapport au tableau de répartition suivant les disciplines est aberrante. Nous pensons que le nombre élevé de chargés de cours à durée indéterminée dans une branche ne peut être un facteur de blocage d'accès à la fonction pour des candidats au concours. Si le SEW s'est engagé pour régulariser la situation professionnelle des chargés d'éducation en service depuis des années, la garantie de l'emploi ne doit pas pour autant conduire à un privilège à l'encontre de ceux qui suivent la voie régulière du concours de recrutement et du stage pédagogique. En d'autres termes, les chargés d'éducation à durée indéterminée devraient pouvoir être déplacés dans un autre établissement ou enseigner d'autres branches !
Quant à ladite « réorganisation des cours » en sciences économiques et sociales, il s'agissait en réalité de diminuer l'encadrement des élèves dans des cours à applications informatiques dans l'enseignement secondaire technique. A présent, ces cours ne sont plus dédoublées à partir d'un seuil de 24 élèves, ni assurés conjointement par deux enseignants. La contrepartie en est évidemment une perte de la qualité de l'enseignement.
Guy Foetz
1 Font partie de cette commission: M. J. Hansen, M. S. Koenig, Mme V. Rhein, M. J. Levy, M. A. Wilmes, M. G. Zens, (MENFP); M. J. Fettes (Ministère d'Etat); M. J-M. Kirsch (ministère de la Fonction publique); M. JM. Haensel (Inspection générale des Finances); Mme G. Ditsch (Statec); M. J-M. Weber (UdL-Département de la Formation pédagogique), M. R. Bohnert (Collège des directeurs de l'ES); Mme M. Gillen (Collège des directeurs de l'EST); M. G. Alff (expert en informatique).
2 Rapport de planification des besoins en personnel enseignant de l'enseignement postprimaire de 2008/2009 à 2012/2013, MENFP, juillet 2008, page 19.
3 Rapport de planification des besoins en personnel enseignant de l'enseignement postprimaire de 2007/2008 à 2001/2012, MENFP, juillet 2007, page 20.
4 Ibidem (2), page 20.
5 de 27.236 élèves en 1999/00 à 33.148 élèves en 2007/08.
6 Le rapport 2006-07 avait tablé sur un chiffre de 600 élèves supplémentaires par an.
7 Le rapport 2006/07 avait présenté les estimations suivantes: 2007/08: 59 postes 2008/09: 70 postes; 2009/10: 81 postes; 2010/11: 94 postes; 2011/12: 107 postes. On peut donc conclure qu'en 2007, le MENFP avait surestimé l'impact du nouveau règlement sur l'augmentation de la tâche et qu'il a révisé ces chiffres vers le bas