Frais d'obtention relatifs à un ordinateur personnel:

Les antécédents
Depuis l'année fiscale 2006, l'Administration des Contributions directes refuse de déduire les frais en relation avec l'ordinateur personnel comme frais d'obtention du revenu net des enseignant(e)s.
Une circulaire dans ce sens a été adressée à tous les bureaux d'imposition par le directeur des Contributions directes. Suivant l'argumentation de l'administration fiscale, l'ordinateur serait aujourd'hui un bien commun et les dépenses en question seraient effectuées dans l'intérêt du ménage du contribuable et pour l'entretien des membres de sa famille. Par ailleurs, une déduction à titre de frais professionnels ne serait pas admissible puisqu'on ne pourrait différencier objectivement entre l'usage professionnel et l'usage privé.
Pour le SEW, cette argumentation n'est pas acceptable: - d'une part, l'ordinateur constitue aujourd'hui pour tout-e enseignant-e un instrument de travail quotidien indispensable pour préparer et rédiger les cours et devoirs, pour faire des recherches sur Internet dans l'intérêt de son activité professionnelle et pour gérer le courrier électronique professionnel, notamment celui en provenance du MENFP. En résultent donc des dépenses typiques en relation directe avec l'exercice de la profession enseignante, dépenses réalisées en vue d'acquérir, d'assurer et de conserver les recettes de l'occupation salariée, ce qui correspond bien à la définition des frais d'obtention - d'autre part il existe bel et bien des critères objectifs qui permettent de prouver qu'un ordinateur est utilisé exclusivement ou quasi exclusivement à des fins professionnelles. Parmi ces critères figurent notamment les programmes installés. Par conséquent, le SEW a recommandé à ses membres de continuer à déclarer leurs frais d'obtention en relation avec l'ordinateur et d'introduire dans un délai de trois mois un recours contre la décision d'imposition, à compter de la réception du bulletin de l'impôt sur le revenu, par l'envoi d'une lettre de réclamation au directeur des Contributions directes. Une lettre modèle dans ce sens est à disposition sur notre site www.sew.lu Parallèlement, un recours soutenu par le département juridique de l'OGBL a été introduit par un de nos membres devant le tribunal administratif.
Le jugement en première instance vient de tomber en date du 4 juin 2009, qui donne raison sur toute la ligne à notre argumentation. Nous publions ci-dessous des extraits marquants de ce jugement:
Le jugement du tribunal administratif (extraits majeurs)
Le tribunal ne saurait partager l'argumentation du directeur [des Contributions directes] suivant laquelle un ordinateur ne pourrait de nos jours plus être considéré comme un instrument de travail. En effet, s'il peut être admis qu'aujourd'hui la majorité des ménages disposent d'un, voire de plusieurs ordinateurs, cette circonstance en elle-même ne saurait cependant constituer un obstacle à la prise en considération d'un ordinateur comme instrument de travail …: (…)
L'utilisation professionnelle doit pouvoir être établie sans difficultés majeures et d'une façon adéquate, selon des critères objectivement contrôlables, et la part professionnelle ne doit pas seulement être d'importance minime …. (…)
Si … les dépenses servent exclusivement ou quasi exclusivement à des fins professionnelles, elles sont à considérer comme des frais d'obtention, et dans ce cas elles sont déductibles intégralement. (…)
... il appartient, en l'espèce, en principe au demandeur d'établir que les frais dont il fait état, répondent aux conditions imposées afin d'être admis à titre de frais d'obtention.
Il convient dès lors d'examiner, au regard des conditions exposées ci-dessus, les frais de matériel informatique qui sont visés par le présent recours. (…)
… le motif basé sur une absence de preuve de critères de distinction des parts privée et professionnelle ne saurait justifier la décision sous examen. (…)
… la preuve des déclarations ne peut … être exigée par le bureau d'imposition que dans la limite de ce qui est raisonnable (« soweit ihm dies nach den Umständen zugemutet werden kann « ). … le contribuable n'est pas dispensé de cette preuve et ne saurait se contenter d'une simple affirmation que l'équipement litigieux est exclusivement utilisé à des fins professionnelles, mais il doit rapporter, dans la mesure de ce qui est raisonnable, des éléments de nature à convaincre de ses affirmations.
Le tribunal est amené à conclure qu'en l'espèce, le demandeur a fourni des explications détaillées, qui sont plausibles et concordantes, tant sur la nécessité et l'intérêt de l'utilisation d'un ordinateur dans le cadre de son activité professionnelle, que sur la manière de laquelle cet équipement informatique est utilisé à des fins professionnelles, explications qui en tant que telles ne sont d'ailleurs pas remises en cause par le directeur [des Contributions directes] dans la mesure où il admet que le demandeur utilise couramment ou même de façon prépondérante l'ordinateur pour de multiples tâches en relaticn avec son emploi … .
En présence de telles explications, le directeur ne saurait se retrancher derrière le simple constat de l'absence de preuve que l'utilisation du matériel n'est pas privée, en imposant ainsi une charge de preuve négative au contribuable, charge de preuve qui dépasse ce qui peut être considéré comme raisonnable …. En l'espèce, les déclarations détaillées et plausibles du demandeur sont de nature à corroborer son affirmation basée sur une utilisation professionnelle exclusive ou quasi exclusive des équipements. Face à ces explications, le directeur n'était pas fondé à dénier la déductibilité des frais litigieux au seul motif d'un défaut de preuve d'une absence d'utilisation privée, sans rencontrer utilement les déclarations du demandeur. (…)
Par ces motifs, le tribunal administratif (…) reçoit le recours …; … le déclare justifié; … réforme la décision du directeur des Contributions directes; dit que les frais relatifs à un ordinateur et une imprimante de l'ordre de … € sont à prendre en considération à titre de frais d'obtention; renvoie le dossier au directeur des Contributions directes pour exécution et pour transmission au bureau d'imposition compétent; condamne l'Etat aux frais de l'instance.
Les suites à donner
Etant donné qu'il s'agit ici d'une question de principe, il est hautement probable que dans les 40 jours, l'administration fiscale relèvera appel de ce jugement. En attendant, nous recommandons à nos membres de continuer à réclamer leurs frais d'obtention en relation avec l'ordinateur et de se référer dans leur recours, au jugement du 4 juin 2009 du tribunal administratif en relation avec le numéro 24908 du rôle.
Guy Foetz
Professeur de sciences économiques et sociales au LTNB
Vice-président