«Après les élections» ne doit pas être «avant les élections»!

06.05.2009

«Après les élections» ne doit pas être «avant les élections»!


Les élections du 7 juin semblent mener à la reconduction de la coalition précédente. Nous espérons que les problèmes au niveau de l'éducation nationale ne resteront pas les mêmes pour autant et que le programme gouvernemental saura cette fois planter les jalons permettant de promouvoir l'école publique luxembourgeoise.

Parmi ces jalons, nous citerons les deux plus importants dans l'optique du SEW:

Il y a d'abord le recrutement suffisant d'enseignants, mais aussi d'éducateurs et d'éducateurs gradués, ainsi que de tout le personnel devant intervenir dans le cadre d'équipes multiprofessionnelles. Car l'école ne peut fonctionner que par le professionnalisme et la disponibilité de son personnel. Si ce personnel fait défaut, comme c'est malheureusement le cas depuis des années, on n'a pas à s'étonner que l'école a du mal à remplir son rôle de creuset des différentes couches sociales et que des réformes, aussi bien intentionnées soient-elles, calent dès le départ. Le SEW/OGBL mesurera les efforts d'un Ministre de l'Education prioritairement à l'aune des recrutements qu'il réalisera dans les années à venir

Ceci compte tout particulièrement pour l'enseignement secondaire et secondaire technique, où le manque d'enseignants qualifiés s'intensifie d'année en année et où les équipes pluridisciplinaires appartiennent toujours au royaume des contes de fées – sauf dans des établissements particuliers comme le Neie Lycée. Il est exclu pour le SEW d'admettre comme échappatoire au déficit croissant de titulaires qualifiés l'engagement accru de chargés de cours, la création d'une réserve de suppléants ou l'abaissement des conditions de formation initiale. Nous demandons au contraire un recrutement au niveau d'un master académique disciplinaire, une adaptation du plan quinquennal de recrutement, une réforme du concours d'admission et une réforme du stage pédagogique.

Au niveau de l'enseignement fondamental, le nouveau diplôme en Sciences de l'Education, la loi sur l'enseignement fondamental et le reclassement dans la carrière supérieure risquent de laisser un goût amer dans la bouche des instituteurs. Le diplôme universitaire n'est finalement qu'un bachelor, malgré ses 240 ECTS, la cogestion et le partenariat figurent bel et bien dans la loi sur l'enseignement fondamental, mais certaines dispositions autoritaires risquent de venir à bout des meilleures volontés, le reclassement est bien chèrement payé par une augmentation considérable de la tâche de même que des dispositions fondamentalement injustes comme le «lissage des pensions» ou le recalage des jeunes.


Il s'entend qu'un recrutement suffisant de personnel enseignant et éducatif comportera un coût élevé. Mais c'est bien l'investissement le plus rentable qui soit, celui dans l'avenir de nos enfants et de notre économie. Notons qu'au cours de la législature passée, les dépenses en éducation ont encore une fois évolué moins vite que le PIB et que le Luxembourg figure parmi les pays avec une proportion de dépenses éducatives plutôt faible.


Viennent ensuite les conditions de travail des enseignants et du personnel éducatif. Rappelons que le programme gouvernemental de 2004 avait tout autant été l'occasion pour le SEW d'insister sur la création de structures de participation pour faire évoluer l'école luxembourgeoise de façon durable.

Alors que les premières entrevues avec l'ancienne ministre de l'Education nationale avaient été encourageantes parce que les acteurs du terrain avaient l'impression d'être écoutés, et alors que ces discussions ont eu même des répercussions dans la nouvelle loi sur l'enseignement fondamental avec les comités de cogestion et le partenariat avec les parents, on a senti à un certain moment s'installer un langage technocratique et autoritaire, qu'il provienne de l'OECD, des réunions bruxelloises ou de nos experts autochtones. C'est à ce moment qu'on a vu apparaître les contingents, les épreuves standardisées, l'agence qualité, les bilans de compétence, les portfolios et tout le reste.

Le SEW/OGBL n'est pas de ceux qui prétendent que les enseignants n'ont pas à rendre des comptes, encore faut-il s'accorder sur des modalités raisonnables. Mais quand ces discussions ne sont plus possibles, que ce soit à cause d'échéances rapprochées, de blocages politiques ou d'effets d'annonce à ne pas rater, on dérape et c'est alors que l'école n'est plus crédible. Le SEW/OGBL est certainement favorable à une nouvelle forme d'évaluation des élèves plus explicite et moins aléatoire, mais il faut savoir clairement où on va et trouver une forme qui soit compréhensible pour tous. Les modèles qui nous sont parvenus jusqu'à présent ne correspondent ni à l'un ni à l'autre critère et il est à prévoir qu'ils seront abolis aussi rapidement qu'ils n'auront été introduits. Dommage pour la crédibilité de l'école, dommage pour l'image professionnelle des enseignants!

Pourquoi tout ce gâchis? Tout porte à croire que le rythme des responsables politiques ait du mal à s'accorder au rythme de l'école. Nos ministres sont souvent bien plus hyperactifs que les plus terribles de nos élèves, ce qui fait disparaître le temps de la réflexion, pourtant absolument nécessaire dans notre métier. On aimerait leur suggérer la devise «Weniger ist mehr!». Après un temps de l'effervescence, il nous faudrait absolument celui de la consolidation pour œuvrer dans le sens d'une réforme durable.

Finalement, que peut-on souhaiter d'un nouveau Gouvernement et de son Ministre de l'Education?

Tout d'abord une écoute des milieux professionnels concernés et de tous les acteurs du terrain, élèves et parents compris. Pour cela il faudra notamment permettre aux nouveaux comités du fondamental de jouer pleinement leur rôle.

Ensuite ce sera encore et toujours la même revendication pour un Ministère unique regroupant l'Enseignement supérieur, l'Education nationale avec évidemment la Formation professionnelle, l'Education différenciée et le péri- et parascolaire. Nous aurons l'occasion d'y revenir si le nouveau programme gouvernemental est établi.

Pour l'instant, à l'issue d'une année de travail ardu, nous souhaitons à toutes et tous les collègues des vacances d'été bien méritées.



Monique Adam,
Présidente du SEW

Guy Foetz
Vice-président du SEW