Nº 1701 Application de la directive 77/486/CEE visant la scolarisation des enfants de travailleurs migrants - Cours de langue maternelle intégrés (24/04/2007 Félix Braz) Q/R

24.04.2007

Monsieur le Président,
Conformément à notre règlement interne, je me permets de poser la question parlementaire suivante à Madame la Ministre de l'Education nationale et de la Formation professionnelle.

Le 25 juillet 1977, le Conseil des Ministres des Communautés Européennes a adopté la directive 77/486/CEE visant la scolarisation des enfants de travailleurs migrants.
L'article 3 de cette directive stipule entre autres que l'Etat membre doit prendre des mesures appropriées en vue de promouvoir, en coordination avec l'enseignement normal, un enseignement de la langue maternelle et de la culture du pays d'origine en faveur des enfants de travailleurs migrants.
Dans ce contexte, je voudrais savoir:
  • Le gouvernement luxembourgeois estime-t-il être en accord avec les exigences de cette directive?
    Lors de la récente visite-éclair du président de la république portugaise, le modèle des cours de langue maternelle intégrés a été mis en exergue.
  • Quel est le nombre d'élèves portugais qui fréquentent des cours intégrés?
  • Quels sont les établissements scolaires où cette offre fonctionne?
  • Quels sont les établissements scolaires dans lesquels des cours parallèles sont offerts pour l'année 2006/2007 ?
  • Au cours de la dernière décennie, quelle a été l'évolution du nombre de cours parallèles et intégrés?
  • A quoi se heurte la multiplication des cours de langue intégrés?
  • Les enseignants luxembourgeois et portugais suivent-ils une formation continue commune?
  • Dans quelles autres langues des cours parallèles et intégrés sont-ils offerts?
  • Un document d'évaluation des cours intégrés existe-t-il ?


Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Felix Braz
Député





Réponse de la Ministre de l'Éducation nationale et de la Formation professionnelle à la question parlementaire N° Q 1701 du 24 avril 2007 de M. Felix Braz, relative à l'enseignement de la langue maternelle.
Le Luxembourg est un des rares pays au monde à offrir des cours en langue maternelle intégrés dans le cadre du programme et de l'horaire scolaire ordinaire.

La plupart des pays ont dû renoncer à intégrer les cours dans l'horaire scolaire, principalement pour des raisons d'organisation et d'équité. Il est en effet impossible d'offrir à chaque élève des cours dans sa langue maternelle. Voilà pourquoi ces cours, organisés par les ambassades ou par des associations, sont généralement offerts en dehors de l'horaire scolaire et sans lien avec le programme scolaire.

Cours intégrés

Dès 1983, le Luxembourg a offert des cours « intégrés» (c.-à.d. intégrés dans l'horaire et le programme scolaire) en langue espagnole, italienne et portugaise.
Au cours des 25 dernières années, la demande de cours intégrés en langue portugaise a fortement augmenté.
Les cours en espagnol n'ont fonctionné que pendant deux ans, et ont été arrêtés, faute de candidats en nombre suffisant.
Les cours intégrés en langue italienne, suivis par 49 élèves en 2005/06, ont été supprimés par l'Ambassade italienne en plein milieu de cette même année scolaire.

Cours en dehors de l'horaire scolaire

Le Ministère de l'Education met à disposition des locaux scolaires pour les cours dits « parallèles », offerts en dehors des horaires scolaires par les ambassades.

Cours de portugais dans l'enseignement secondaire classique

Depuis l'année scolaire 2005/06, des cours de langue portugaise sont offerts à partir de la classe de Ille de l'enseignement secondaire classique. Chaque année, un sondage est réalisé auprès de tous les élèves de la classe de IVe, leur demandant s'ils sont intéressés à suivre des cours de portugais (soit des cours de 48 langue vivante de la section A, soit des cours à option pour les élèves de toutes les sections).
A ce jour, des cours à option sont offerts dans le Lycée des Garçons Luxembourg, le Lycée des Garçons Esch et le Lycée classique de Diekirch.
Le Luxembourg est donc entièrement en accord avec la directive européenne de 1977 qui stipule entre autres que l'Etat membre doit prendre des mesures appropriées en vue de promouvoir, en coordination avec l'enseignement normal, un enseignement de la langue maternelle et de la culture d'origine en faveur des enfants de travailleurs migrants.

Evolution du nombre d'élèves des cours intégrés et parallèles de 1997/98 à 2006/07

Etablissements où fonctionnent ces cours
Voir annexes 1,2,3


Autres langues

A côté des cours intégrés et parallèles, différents organismes de non-communautaires (chinois, bosniaques, etc.) offrent des cours de langue, mais comme ils sont organisés soit par les ambassades, soit par des associations, il est difficile de savoir quels cours fonctionnent actuellement.

Formation continue commune

Les enseignants portugais ont accès à tous les cours de formation continue offerts par le Ministère de l'Education nationale du Luxembourg. A notre demande, ces cours sont reconnus par les autorités portugaises et valent également pour l'avancement dans la carrière des enseignants portugais, mais à ce jour, il n'y a pratiquement pas eu d'inscriptions.
Des formations spécifiques communes, ayant comme thème les matières enseignées dans les cours intégrés ou les nouvelles technologies de l'information, sont organisées régulièrement à l'intention tant des enseignants luxembourgeois que des enseignants portugais.

Document d'évaluation.

Au cours des années passées, différentes études ont été réalisées sur le fonctionnement des cours intégrés, en collaboration avec l'Ambassade du Portugal et l'Université de Lisbonne.
L'évaluation de l'impact des cours intégrés ayant fait partie des mesures prévues au programme gouvernemental, le Ministère de l'Education nationale a effectué une enquête en janvier 2005 auprès de tous les élèves de nationalité portugaise âgés de 15 ans afin d'obtenir des informations sur la fréquentation des cours de/en langue portugaise (cours intégrés, cours parallèles, pas de cours suivis) ainsi que sur l'utilisation et l'impact de la langue portugaise au quotidien. Ces données ont été mises en relation avec différentes/ données relatives au parcours scolaire de ces élèves, en vue d'évaluer l'impact des cours.

Résultats de l'étude

Pour ce qui est de l'influence sur le parcours scolaire des élèves, on n'a pas pu constater d'influence significative. Il ne s'agit en tout cas pas d'un facteur significatif pouvant influencer dans un sens ou l'autre les chances de réussite dans le système scolaire luxembourgeois. Il n'y a pas non plus de lien avec le niveau scolaire atteint à la fin de l'obligation scolaire.
Par contre, il est indéniable que la valorisation de la langue maternelle a un effet bénéfique sur des aspects personnels extra-scolaires, tels que le sentiment d'appartenance à la communauté portugaise ou un rapprochement à des origines parfois lointaines.
Le rapport de l'étude a été envoyé au Président de la Chambre des Députés, ainsi qu'à tous les partenaires concernés, en novembre 2005. Il figure sur le site Internet du Ministère.

Problèmes et pistes d'action

La multiplication du nombre de cours intégrés se heurte essentiellement à des facteurs d'organisation: nombre insuffisant d'enfants par école et par niveau et nombre insuffisant de salles de classe disponibles.
Comme les cours intégrés ont lieu dans le cadre du programme de l'école primaire luxembourgeoise, et qu'ils doivent être autorisés par les communes, mais organisés par l'Ambassade du Portugal avec des enseignants recrutés et rémunérés par les autorités portugaises, l'organisation des cours ainsi que les responsabilités respectives ne sont pas toujours faciles à régler.
Il arrive qu'il y ait un manque d'enseignants portugais, resp. que les enseignants arrivent au Luxembourg après le début de l'année scolaire, alors que tous les horaires scolaires sont déjà établis.
Il faut signaler aussi que la pratique de renouveler tous les 4 ans le recrutement des enseignants au Portugal n'est guère favorable à la continuité des cours, ni à l'échange nécessaire entre enseignants luxembourgeois et portugais.
Voilà pourquoi le Ministère entend privilégier plusieurs mesures:
  1. L'assistant de langue maternelle au précoce et au préscolaire, parlant luxembourgeois et portugais. Cette mesure, préconisée dans les circulaires de printemps, est adoptée par quelques communes et donne d'excellents résultats à un moment où la langue maternelle est encore en pleine construction. Par ailleurs, elle facilite l'accès à la langue luxembourgeoise.
  2. Dans le cadre du plan d'action langues pour 2007-2009, différentes actions sont prévues visant la valorisation de la langue et de la culture portugaise.
  3. Les activités d'ouverture aux langues: en vue de favoriser la valorisation des langues maternelles de tous les enfants, le Ministère est en train d'élaborer un projet d'ouverture aux langues s'adressant à tous les enfants. Ces activités ont pour but de
    • susciter la curiosité des élèves face aux similitudes et différences entre les langues
    • développer leurs capacités d'observation, d'analyse et de réflexion sur les langues
    • accroître leur motivation à apprendre les langues
    • favoriser une attitude positive vis-à-vis de la diversité linguistique et culturelle



Mady Delvaux-Stehres
Ministre de l'Éducation nationale et de la Formation professionnelle