« Här Minister, net schwätzen, mee handelen a Verantwortung iwwerhuelen »

Pour préparer sa traditionnelle conférence de presse de la rentrée scolaire, le SEW/OGBL avait l’intention de dresser un « bilan intermédiaire » des activités et des mesures prises par l’équipe de monsieur Meisch pour améliorer la qualité scolaire. Mais il n’était pas facile voire impossible de déceler des initiatives concrètes du ministère dans ce sens. Certes l’éducation nationale avait dominé l’actualité tout au long de l’année scolaire passée, mais il s’agissait « seulement » d’un litige opposant le ministre aux syndicats au sujet de mesures d’austérité visant les seuls enseignants.
En ce qui concerne les dossiers « chauds » et urgents de l’enseignement, le ministre s’est limité à communiquer des idées de projets voire à annoncer de nouvelles études pour analyser et « cibler » des problèmes et difficultés pourtant bien connus.
Dès le départ, le SEW/OGBL ne s’est pas résigné à mettre en garde contre la mise en oeuvre de la réforme de la formation professionnelle. Toute une génération de jeunes se retrouve actuellement dans une situation désespérée et risque de ne pas pouvoir terminer ses études. Ces jeunes doivent payer les frais d’une réforme mal conçue. La débâcle fut pourtant annoncée, mais le ministère n’était absolument pas à l’écoute des critiques et suggestions du SEW/OGBL. La formation professionnelle se trouve dans une impasse, mais le ministre refuse toujours une mise à plat de la réforme. Ceci permettrait au moins de repartir à zéro pour créer une formation professionnelle à la hauteur des exigences.
L’élaboration d’un cours unique destiné à remplacer les cours d’enseignement religieux et les cours d’enseignement moral et social se fait dans une non-transparence absolue. Les membres du groupe de travail ont été mis sous le secret professionnel et aucune information sur les travaux et discussions ne doit être communiquée vers l’extérieur. Lors d’une entrevue au mois de mars, les ministres Bettel, Meisch et Braz avaient promis au Cercle de Coopération des Associations Laïques que tous les trois mois le groupe de travail publierait un rapport intermédiaire pour avis et discussion.
Six mois plus tard, le CCAL qui avait sévèrement critiqué le choix de M Oelkers, coordinateur du groupe, et de ses collaborateurs, attend toujours le premier rapport. Les informations du ministre sur les travaux sont contradictoires : en septembre le ministre Meisch a parlé d’une bonne progression des travaux. Quelques semaines plus tard, l’introduction du cours unique est reportée. Et soudain, le ministre dénonce des discussions difficiles au sein du groupe.
Ce cours unique, un des grands projets du Gouvernement actuel, est définitivement mal parti. Les difficultés dans l’élaboration d’un programme sont dues aux mauvais choix du ministre: la nomination de Monsieur Oelkers à la tête du groupe de travail, la composition du groupe dont la moitié des membres viennent de l’enseignement religieux, le huis clos des débats. La voie tracée n’est pas celle d’une éducation citoyenne, basée sur des connaissances historiques et sociologiques et favorisant la réflexion critique selon une tradition philosophique.
Dans le dossier dominant du fondamental, la mise en place d’une nouvelle version des bilans intermédiaires, les responsables du groupe de travail semblent avoir adopté une gouvernance par sondage. Leurs conclusions se basent essentiellement sur les réponses des parents et des enseignants concernés. Le SEW/OGBL avait demandé une mise à plat des bilans actuels pour élaborer des bilans qui suivent les recommandations des comités d’école et des syndicats. Or la nouvelle version provisoire qui actuellement est dans une phase d’essai, sera à nouveau remodelée pour l’année scolaire 2016/17. Il s’agit d’un modèle qui essaie de réunir le principe de l’acquisition des compétences et une évaluation du travail de l’élève. Le SEW/OGBL reste d’avis que cette nouvelle version, améliorée par rapport à la précédente, n’est toujours pas l’outil approprié pour une évaluation de qualité.
Malheureusement toute la politique éducative semble être guidée par les sondages et l’opinion publique à court terme. Le ministre, devenu extrêmement prudent, évite toutes les décisions politiques qui pourraient mener à une divergence de vues ou s’avérer impopulaire auprès des parents. Ses résultats dans les sondages et son image de marque auprès du grand public dirigent ses actions et initiatives sur le plan de la politique scolaire. Les dossiers qui ne sont pas populaires ou les mesures ne rencontrant pas le consensus général, sont négligés ou laissés à l’abandon.
Une des rares autocritiques du ministre portait d’ailleurs sur un manque de communication de son ministère sur les travaux effectués. Le ministère a d’ailleurs fait réaliser une série de petits films qui peuvent être visionnés sur le site web du MENFP et qui se résument à une autopromotion du ministre. Les coûts de ces films ont certainement neutralisé une grande partie des économies que le gouvernement a réalisées par les mesures d’austérité au détriment des enseignants du secondaire.
Par conséquent, les enseignants se voient forcés d’adopter et de suivre le même principe de la mise en scène. Toute action d’une école, aussi insignifiante soit-elle, doit être communiquée, à l’aide de slogans, de flyers et d’affiches et se retrouver, photos à l’appui, dans la presse et les réseaux sociaux. Ce n’est plus le travail pédagogique quotidien qui semble essentiel, mais les écoles doivent renchérir avec des actions spectaculaires, même si leur efficacité pédagogique reste très douteuse.
Ainsi l’enseignement public est préparé au système de la concurrence, non seulement entre les écoles publiques, mais surtout avec des écoles privées. Si les citoyens ne réussissent pas à faire barrage au TTIP, les écoles privées gagneraient une plus grande emprise sur le « marché » scolaire. Et ces écoles privées n’auront pas d’objectifs idéologiques, mais seront à la quête de bénéfices pécuniaires.
A ce jeu-là, l’école publique gratuite, garant de la cohésion sociale et de l’équité des chances, n’a rien à gagner.
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Patrick Arendt Président du SEW/OGBL |