Document de travail adressé par l’Intersyndicale (APESS, FEDUSE/CGFP, SEW/OGBL) à l’attention de Monsieur le Médiateur A. Rodesch

Document de travail adressé par l’Intersyndicale (APESS, FEDUSE/CGFP, SEW/OGBL) à l’attention de Monsieur le Médiateur A. Rodesch
Dans le cadre des mesures d’austérité prévues par le Paquet d’avenir adopté par le gouvernement, le ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse avait envisagé d’augmenter la tâche des enseignants soit par l’application du coefficient réducteur en classes terminales soit par le biais d’une modulation des décharges d’âge alors que celles-ci sont partie intégrante de la carrière au point d’en constituer un élément indissociable.
Suite au refus réitéré des syndicats et du corps enseignant de concéder une telle modification de la tâche des enseignants et face à l’obstination du ministre, les syndicats APESS, FEDUSE/CGFP et SEW/OGBL ont été amenés à engager la procédure de conciliation qui s’est soldée par un échec suite à la demande du ministre d’acter la non-conciliation.
1) Conciliation
Les discussions menées entre le MENJE et les représentants syndicaux dans le cadre de la procédure de conciliation ont essentiellement porté sur la mesure n°118 du Paquet d’avenir (libellée « Modification de la tâche des enseignants ») et les mesures à caractère pédagogique en vue de la réalisation des économies réclamées par le ministre.
1.1. Modification de la tâche
La modification de la tâche des enseignants par l’application du coefficient réducteur ou par la modification du système des décharges pour ancienneté constitue la principale contribution réclamée par le ministre Meisch au corps enseignant. Cette modification se traduirait, dans les faits, par une augmentation du volume de travail et donc de la tâche des enseignants, et ce sans contrepartie financière.
A cet endroit, il convient de rappeler que les enseignants contribuent déjà à double titre au Paquet d’avenir : d’abord via l’abolition du trimestre de faveur qui s’applique à tous les fonctionnaires d’Etat, dont les enseignants, et ensuite via l’augmentation de 2% du taux de la TVA et l’impôt extraordinaire d’équilibrage budgétaire de o,5% (en vigueur depuis le 1e janvier 2015) auxquels sont soumis les citoyens et les contribuables luxembourgeois .
De ce fait, la mesure n°118 constitue un 3e apport exigé exclusivement de la part des enseignants qui sont donc la seule catégorie au sein de la Fonction publique à être directement touchée et nommément visée par une 3e contribution au Paquet d’avenir.
Or, depuis les huit mois que dure le conflit, le ministre Meisch n’a à aucun moment fourni de motif valable pour justifier le bien-fondé et la nécessité de cette 3e contribution réclamée aux enseignants.
1.2. Qualité scolaire
Outre la modification de la tâche, les mesures visant une amélioration de la qualité scolaire ont également été discutées dans le cadre de la conciliation.
D’emblée, il convient de noter que les enseignants sont tout à fait disposés à contribuer à l’amélioration de l’enseignement qui, de toute façon, ne pourra se faire sans leur participation active.
Toutefois, de l’avis des représentants des enseignants, les dispositions concernant la qualité scolaire, les mesures pédagogiques et la réussite des élèves sont bien trop importantes pour être traitées dans une procédure de litige axée sur des considérations financières.
Comme il est inadmissible que l’éducation des jeunes soit exclusivement dictée par le seul souci de faire des économies, les représentants des enseignants sont d’avis que les discussions sur l’amélioration de la qualité scolaire doivent trouver leur place dans le cadre habituel des concertations entre le MENJE, les représentants du corps enseignant et les Commissions nationales des programmes.
1.3. Position du corps enseignant par rapport aux mesures d’économie
A l’occasion du vote au sujet de la proposition d’accord issue de la procédure de conciliation, le corps enseignant a signifié un rejet franc et massif, de l’ordre de 93,7%, des mesures d’économies exigées par le gouvernement et figurant dans le procès-verbal final proposé par le conciliateur.
Bien entendu, un rejet aussi massif de la politique d’économies menée par le gouvernement et le ministre Meisch engage les représentants syndicaux à respecter la volonté exprimée par ce vote et à se conformer au mandat qu’ils se sont vu confier par le corps enseignant au travers du vote – mandat qu’ils se sont d’ailleurs engagés à respecter à la lettre.
2) Aspects juridiques
2.1. Modification de la tâche
Les revendications du ministre constituent une attaque injustifiée et discriminatoire contre les droits statutaires des enseignants, visant aussi bien leur carrière que leur tâche professionnelle.
En effet, une telle mesure entraînerait nécessairement et immanquablement une modification des conditions de rémunération puisque les fonctionnaires concernés devraient prester plus d'heures pour un traitement identique. A ce titre, il se pose donc la question de la discrimination des enseignants (article 10bis de la Constitution) par comparaison à d'autres catégories des fonctionnaires de carrières comparables.
2.2. Mesures d’économie ayant un impact pédagogique
Tout d’abord, il convient de noter que les deux parties, en l’occurrence les représentants syndicaux et le ministre, sont liées par la lettre de saisine adressée le 18 décembre 2014 par l’Intersyndicale à la Commission de conciliation ayant pour objet le litige collectif dans l’enseignement secondaire et secondaire technique portant sur la mesure n°118 du Paquet d’avenir du gouvernement dans le cadre spécifique de la procédure de la grève.
Il est également à noter que, traditionnellement, les litiges collectifs qui ont fait l’objet d’une conciliation obligatoire ont essentiellement eu comme objet les conditions financières de travail.
Enfin, selon les dispositions de la nouvelle loi du 25 mars 2015 concernant les litiges collectifs dans la Fonction publique, les discussions à caractère pédagogique n’ont pas leur place dans une procédure de litige entre un ministre et ses fonctionnaires.
3) Proposition de l’Intersyndicale
Au vu des considérations qui précèdent, les syndicats soussignés demandent au gouvernement de retirer la mesure n°118 de son paquet dit « d’avenir ».
C’est seulement à partir du moment où le ministre cessera d’exiger de la part des enseignants une contribution à la fois injuste et injustifiée que la paix scolaire pourra être rétablie et que les discussions concernant les réformes et l’amélioration de la qualité de l’enseignement pourront être entamées. Dès lors, le corps enseignant et ses représentants seront tout à fait disposés à contribuer par leur expérience et leurs propositions à ce que l’enseignement secondaire puisse de nouveau aller de l’avant.